Dans le cadre de l’alliance militaire franco-russe, le Tsar Nicolas II doit participer à la phase terminale des grandes manœuvres de l’Est le 19 septembre 1901 et passer des troupes en revue à Bétheny le 21 septembre. Il est invité à visiter le fort de Witry-lès-Reims.
Parti en train de Compiègne avec la Tsarine, il est accueilli par le Président de la République, Emile LOUBET, assisté du Ministre de la guerre et de nombreux officiers français et russes.
C’est à cheval que le Tsar assiste ensuite à une spectaculaire manœuvre au fort de Fresne : "fusillades, canonnades, charges lointaines de cavalerie, clameurs d’infanterie qui balaient la plaine. Un assaut endiablé est donné à ce fort défendu par une solide garnison, entouré de fossés, hérissé d’obstacles, murailles, fils de fer, piquets enchevêtrés. Tout est enlevé, emporté par une furie vraiment française".
Après avoir admiré une pièce de la nouvelle artillerie française, le Tsar, la Tsarine, le Président LOUBET et Madame, les chefs militaires déjeunent au Fort de Witry-lès-Reims qui est aménagé pour un déjeuner offert par le Président de la République. Les casemates ont même été transformées en salons superbes et confortables. Deux d’entre elles sont aménagées en salons, l’un est réservé aux souverains, l’autre au Président LOUBET, avec des tapis, des tentures et des tableaux. Une autre, plus vaste, est devenue une salle à manger tendue de soie jaune (le long des murs est suspendue la tenture des douze mois grotesques, que le gouvernement de la République a décidé d’offrir en présent diplomatique au Tsar).
Le Président du Conseil, les ministres de la guerre et des affaires étrangères, le vice-président du Conseil supérieur de la guerre, le chef d’état-major général de l’armée, les commandants du corps participant à la manœuvre, la suite du Tsar et de la Tsarine sont aussi conviés. Pendant le déjeuner, 50 000 soldats se regroupent le long de la route nationale.
Le Maire de Witry, Monsieur DAZY, démissionne pour ne pas avoir à se présenter devant le Tsar ; en fait, les municipalités de villages, aussi bien Bétheny, Fresne que Witry, sont un peu négligées dans ce grand spectacle.
Des deux côtés de la route, c’est une forêt de baïonnettes, les drapeaux s’inclinent. Après cette cérémonie, la route (actuelle RD 151) prend pour un temps le nom d’avenue Nicolas II. Dans toute la région, le public est captivé par la visite princière, la canonnade, la furia de la cavalerie… Des milliers de spectateurs sont sur les chemins autorisés. Witry est plein de monde : des familles entières, des jeunes gens, des gamins y ont passé la nuit du 18 au 19 septembre 1901 pour être en bonne place dès le matin. Plus tard, les récits sont amplifiés : un camp de tentes dressées dans les champs proches du village est surnommé "camp du drap d’or".
Beaucoup de gens achètent des cartes postales représentant les jeunes souverains en buste, idéalement jeunes et beaux, leurs vêtements soulignés de fines paillettes argentées…
Puis, après une visite à Reims, le Tsar et la Tsarine regagnent Compiègne par la voie ferrée.
Texte extrait du livre Il était une fois… Witry-lès-Reims de Marie-Thérèse WATELET et Nadine LOILLIER en vente en mairie.